mardi 17 mars 2015

Le gouvernement veut se refaire une santé au détriment des médecins et des patients

L’examen de la loi santé de Marisol Touraine démarre à l’Assemblée nationale. On l’a vu ce week-end avec la manifestation des professions libérales, les médecins sont vent debout contre la généralisation du tiers payant.

Cette mesure serait pourtant salutaire. Le tiers payant pour tous serait un soulagement car avancer 23 euros à chaque consultation, une ou plusieurs fois dans le mois selon les situations, est un obstacle pour nombre de familles populaires. Que certains médecins et des représentants nationaux s’y opposent par principe au nom de la « responsabilisation » des patients relève du mépris social.

Quant aux médecins qui expriment leur crainte « d’être transformés en salariés », ils colportent les préjugés classiques de la droite. Ils repoussent avec horreur l’idée d’être salariés, mais ils dépendent déjà, par tous les bouts, des organismes publics. Et que deviendraient-ils s’il n’y avait pas l’État pour organiser le système de santé et pour prendre en charge leur formation ?

Face à ces propos réactionnaires, la ministre de la Santé a le beau rôle. Mais la légèreté avec laquelle elle a géré la mise en place technique du tiers payant témoigne de son hypocrisie.

Après des mois de discussions, Marisol Touraine est toujours incapable d’assurer la mise en place d’un guichet unique permettant aux médecins d’avoir un seul interlocuteur à la place des centaines de mutuelles. Et pour cause : elle ne peut pas réduire les moyens de l’Assurance maladie, diminuer son personnel, semer la zizanie dans les services administratifs, d’un côté, et, de l’autre, promettre des miracles administratifs.

C’est pourquoi même les médecins les mieux disposés à l’égard du tiers payant et des patients ont de quoi être en colère. Alors, s’il y a un obstacle à la généralisation du tiers payant, il est surtout à chercher du côté du gouvernement.

À travers cette mesure, le gouvernement veut faire un bon coup politique. Il veut avoir l’air de faire une politique de gauche sans dépenser un centime de plus pour la population et même, si possible, en enlevant des moyens à la santé.

Cette mesure sert de cache misère au gouvernement car sa politique de santé ne permet ni de faciliter l’accès aux soins, ni de lutter contre la médecine à deux vitesses.

Que prévoit le gouvernement pour lutter contre les déserts médicaux, qui se multiplient dans les campagnes et les banlieues populaires ? Que prévoit-il contre les dépassements d’honoraires sur les soins dentaires ou d’optique ? Rien.

Il y a plus de trois millions de personnes sans mutuelle. Elles ont à payer de leur poche le reste à charge, qui n’a fait qu’augmenter au rythme des franchises et des déremboursements de médicaments de ces dernières années.

La facture s’allonge même quand on est soigné à l’hôpital public parce que le forfait hospitalier est de plus en plus cher, parce que le transport en ambulance est de plus en plus restrictif, parce que l’hôpital ne délivre plus les médicaments dits de « confort », parce qu’il faut payer pour avoir une chambre individuelle… Dans certains hôpitaux, la douche chaude et la couverture ne sont même plus garantis. Alors, quand le gouvernement impose aux hôpitaux trois milliards de nouvelles coupes budgétaires cela augure du pire.

À cause des restrictions budgétaires, des hôpitaux de proximité fusionneront, fermeront des services, ce qui signifiera un nombre moindre de lits et des temps d’attente plus longs. Sous couvert de développer la chirurgie ambulatoire et de diminuer les durées d’hospitalisation, on va renvoyer des malades chez eux au plus vite.

Et comme si les personnels hospitaliers n’étaient pas déjà surmenés et incapables de prendre tous leurs repos, le gouvernement prévoit de supprimer 22 000 postes dans les hôpitaux.

Voilà le véritable visage de la politique de santé du gouvernement. Et tout cela pourquoi ? Parce qu’il ne veut pas mettre d’argent dans les services publics. De l’argent, il y en a pour payer la dette aux banquiers, il y en a pour arroser le grand patronat, mais pour la santé, il n’y en a plus.

La dégradation du système de santé est le fruit de la politique anti-ouvrière du gouvernement Valls, mais c’est aussi le résultat d’une évolution vers une société où toutes les activités humaines doivent rapporter de l’argent, dégager des profits, sans quoi elles sont vouées à disparaître même si elles sont indispensables à la population. Au-delà de la politique d’austérité, c’est le capitalisme qui est dangereux pour notre santé.